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Chef Benoît Vidal

Maison étoilée

Benoît Vidal

À L’ONDE DES ÉMOTIONS
Août 2025
6 min.

« La Saga des Etoilés de la destination Lac Annecy » se poursuit avec le Chef Benoît Vidal, 2 étoiles Michelin.

Contenant le cycle de l’infini, le départ comme un retour aux sources de l’évidence, c’est tout un parcours qui a mené le Chef Benoît Vidal à mitonner une cuisine gorgée d’émotion qui a pris un nouvel envol depuis novembre 2023 ici, Sur les Bois, sur les hauts d’Annecy-le-Vieux.

C’est en remontant les eaux, parfois à contre-courant, qu’il a trouvé sa Maison, celle dans laquelle, lui, sa femme et son équipe peuvent briller de mille feux, 2 étoiles accrochées au cœur et de l’or au creux des mains.

Immersion impulsion

Un regard puisant dans l’origine et des souvenirs émus qui remontent comme de petites bulles contenant un grand tout, la vérité d’un goût et la justesse d’une émotion. C’est dans les cuisines de sa grand-mère et cette enfance Pyrénéenne que Benoît Vidal ressent ses premiers émois culinaires. Sa madeleine de Proust à lui, un œuf à l’oseille, qui derrière son apparente simplicité contient déjà l’essentiel. Le gras du jaune et l’acidité verte de l’oseille, un équilibre désarmant, un mélange subtil de fraîcheur et de profondeur, une matrice fondatrice qui, à elle seule, recèle une certaine idée de l’absolu.

 

Très vite convaincu que la cuisine serait son chemin, il le poursuit et le construit, pierre après pierre, avec sens et engagement. Des premiers pas à Paris en 1992 dans la maison Goumard et Prunier puis dans les cuisines de Michel Trama et Michel Guérard et en tant que second chez Régis Marcon jusqu’à une première place de chef en 2003 à Divonne, Benoît Vidal acquiert les techniques, observe ses pairs et pose les jalons de son inspiration grandissante, éclairant les cuisines du Château de Divonne et du Mas des Herbes Blanches d’une étoile prometteuse.

Chef Benoît Vidal

© Sabine Bijasson / Chef Benoît Vidal

Ascension en instinct majeur

C’est en 2011 qu’il monte d’un cran et s’élève sur les hauteurs de Val d’Isère, à 1 950 mètres d’altitude, où il prend les commandes de l’Atelier d’Edmond. La rudesse de la montagne, des hivers âpres et longs qui réservent chaque jour leur lot d’imprévus, une cuisine saisonnière qui profitent peu des faveurs du soleil. Qu’à cela ne tienne, il s’acclimate aux contraintes et s’imprègne de la force de ce terroir montagnard décrochant une première étoile en 2012 puis une seconde en 2015. Ascension fulgurante.

 

« Une fois passée la frustration de refermer les cuisines alors que les premières fraises sortaient de terre, il y avait quelque chose de beau et de sauvage dans cette rudesse », confie-t-il. Cet Atelier, situé au bout de la route du Col de l’Iseran fermée en plein hiver, avait des airs de bout du monde. Un univers qui force l’humilité et la patience. Ici, écouter, sentir, ralentir et composer avec le temps qui semble parfois un peu en suspens pousse l’inventivité dans ses retranchements. « Un peu comme les saumons, j’ai appris à remonter les eaux à contre-courant pour chercher mon oxygène ». Courir vers le haut et se fier à son instinct, braver les tempêtes et chercher toujours l’interstice de lumière qui transcende tout.

Cuisine équilibre du Chef Benoît Vidal

© Noémie Arnaud / Cuisine équilibre du Chef Benoît Vidal

La Maison aux étoiles

Grimpé au sommet de l’Isère, la redescente est un peu violente. Après 12 années passées à défier les éléments, Val d’Isère prend un autre tournant et laisse l’homme sur le carreau. Mais pas tout à fait KO. Son nouveau souffle, il va le puiser en lui mais aussi en ceux qui croient fort en sa destinée. Et ils sont nombreux à le suivre. À commencer par sa femme, Marielle. Mais aussi une bonne partie de sa brigade.

Lorsqu’un heureux hasard le met sur la piste de Daniel Baratier qui cherche un repreneur pour l’Auberge Sur les Bois, les signes pleuvent et une bonne partie de la brigade enclenche le pas. Comme une évidence. Les feuillages des tapisseries qui parent les murs lui rappellent celles dessinées pour ses cartes, la moquette réconfortante au sol, la maison juste au-dessus, les volumes, la sobriété élégante de l’endroit… C’est toute l’âme d’un lieu qui s’exprime dans une forme de dialogue non verbal et entre en connexion avec le chef qui se laisse happer par cette nouvelle énergie.

 

À la rigueur de la montagne succède la douceur du lac qui vibre aux quatre saisons. C’est alors un nouvel espace d’expression qui s’ouvre et vient enchanter chacun des plats, révélant une carte réinventée mais qui garde les curseurs de la cuisine ancrée dans les racines de Benoît Vidal. À tel point que 4 mois plus tard seulement, deux étoiles brillent à nouveau au firmament. Un petit miracle, mais plus encore, un alignement. Mais aussi, terreau de la réussite, la fierté de toute une équipée qui avait dit en poussant la porte de la Maison : « on va décrocher les étoiles pour vous Chef » !

Brigade de la Maison Benoît Vidal

© Noémie Arnaud / Brigade de la Maison Benoît Vidal

De la racine au firmament

Traversée par des courants invisibles et pourtant très forts, la cuisine de Benoît Vidal relève d’une forme d’alchimie instinctive qui recherche toujours le point d’équilibre entre des forces et des saveurs qui se percutent pour mieux se révéler, et ce marqueur clé de l’acidité qui fait sa signature. L’œuf, comme une sorte de matrice nourricière, reste un symbole fort, métaphore du cycle de la vie. En lui, tout réside, et tout s’exprime. Le jaune passé au sel, fumé puis râpé comme une poutargue sur une coquille de noix en préambule ou le blanc, flottant et enneigé, pour épilogue, la poésie est dans les non-dits.

 

Ses plats sont imaginés comme des paysages que l’on traverse, explosion de sensations, de saveurs et de couleurs. Entre lacs et rivières, les poissons d’eau douce, le brochet, la féra et la truite frétillent sur des notes de safran, de verveine ou de reine des prés. À fleur d’eau, le végétal déploie sa palette, carottes et courgettes se révèlent à l’unisson à la stupeur d’un fruit de la passion pétillant.  Des sources aux racines, la balade prend des airs de farandole un peu folle où écrevisses, cuisses de grenouilles et omble chevalier virevoltent et enfin la balade alpestre poursuit son chemin sur les confins des saveurs mêlées d’enfance et de plaisirs régressifs. Verveine, abricots et chèvre frais font la ronde, lait de la ferme, Chartreuse et cassis balancent en cœur, la douceur des uns apaisant l’acidité des autres et inversement. Valse grisante à mille temps.

Cuisine végétale du Chef Benoît Vidal

© Noémie Arnaud / Cuisine végétale du Chef Benoît Vidal

Parmi les plats clés du moment, il y a l’écrevisse et cette aspérule que l’on appelle aussi la vanille des montagnes pour ses notes d’amande amère et de fève de tonka dont le bouillon infusé vient servir de nage au crustacé d’eau douce.

Il y a aussi la finesse de la girolle et sa pomme de terre fondante relevée au vin jaune pour la touche de soleil qui nous emporte sur les sentiers d’une balade forestière aux accents de sous-bois. Vibrante symphonie.

Ecrevisses de la Maison Benoît Vidal

© Anna Donets / Ecrevisses de la Maison Benoît Vidal

Aux sources de l’inspiration

Au plus près de producteurs locaux, prônant haut et fort l’usage de chaque élément dans son entièreté, galvanisant les troupes à grand renfort d’humanité, l’écosystème qui gravite autour de la Maison haut perchée doit être érigé comme un étendard de valeurs convergentes.

Tel un druide à ses chaudrons, le Chef raconte alors une histoire, son histoire, distillant par petites touches les éléments inspirants, révélant si l’envie lui en dit quelques secrets enfouis comme autant de pépites devenues trésors. Et de ses souvenirs surgissent le « Soleil vert » à base de jaune d’œuf cuit à la seule énergie solaire et d’un jus de safran que l’on verse sur un glaçon pour symboliser la fonte des neiges, référence immergée au 1er film d’anticipation écologique et éponyme des années 70.  Ou ce citron dont il fait sécher les zestes et les transforme en poudre noir à saupoudrer sur un blanc en neige en écho à la rue des citronniers de ses origines méditerranéennes. Et de là, nait la lumière, celle qui éblouit et qui révèle.

Tables de la Maison Benoît Vidal

© Sabine Bijasson / Tables de la Maison Benoît Vidal

Parce que le partage est au cœur de l’idée qu’il se fait de son métier, Benoît Vidal pousse l’expérience jusqu’à proposer des cours de cuisine. Sur un thème donné et en petits groupes, l’occasion rêvée de percer quelques secrets et de vivre un moment à part, entre gestes techniques, astuces de chef, temps d’échange et de dégustation, la rencontre est à son comble.

 

Ce qui est sûr, c’est que ceux qui se laissent murmurer cette douce histoire à l’oreille y reviennent. Ceux qui pouvaient gravir les sommets à sa rencontre redescendent avec joie sur les bords du lac d’Annecy pour suivre le flot de son évolution. Et, ici, dans sa Maison, la cuisine de Benoît Vidal est celle du temps qui prend le temps, une ode à la connexion émotionnelle, au partage de valeurs et à ces instants suspendus qui laissent dans leur sillage une pointe de magie où les silences et les rêveries ont toute leur place. La tête dans les étoiles, les pieds dans les racines.

Cuisine partage du Chef Benoît Vidal

© Noémie Arnaud / Cuisine partage du Chef Benoît Vidal

Maison Benoît Vidal

  • Menu « Jour de Cuisine » – 74 €
  • Menu « À l’Onde des Cimes » – 130€
  • Menu « Sentiers à fleur d’eau » – 185 €
  • Menu « Graines d’eau » – 195 €
  • Menu « Des Sources aux Racines » – 215 €

 

Sur les Bois – 79 route de Thônes (Annecy-le-Vieux) – ANNECY

Tél. +33 (0)4 50 88 73 18

 

Maison Benoît Vidal

Cours de cuisine

Crédit photo haut de page :

  • © Noémie Arnaud

Journaliste : Gaëlle Tagliabue