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Auberge du Père Bise dans la Baie de Talloires

Inspiration

Jean Sulpice, sur les cimes de la cuisine alpine

Avril 2025
6 min.

« La Saga des Etoilés de la destination Lac Annecy » se poursuit avec le Chef Jean Sulpice2 étoiles Michelin depuis 2018.

 

Bercée par les eaux, les sensations au vent, c’est dans le cadre sublime à tous les temps de la baie de Talloires que l’Auberge du Père Bise poursuit l’écriture d’une histoire séculaire dont le livre est entre les mains d’un chef, alpin par essence et connecté par évidence à sa nature comme à celle de son territoire de cœur et de sang.

Jean Sulpice cuisine l’authenticité, les émotions reliées à la terre et les sens en effervescence.

Chemins sensationnels

L’identité culinaire d’un chef doit être en tous points connectée à la personnalité de celui qui la crée. À l’Auberge du Père Bise, Jean Sulpice ne porte pas le poids de l’histoire, il écrit la sienne, en toute liberté, deux étoiles accrochées. Pourvu que celles-ci soient au firmament, des sens et des émotions qui l’animent et qu’il partage à travers sa cuisine.

Entrer dans ce lieu, c’est plonger dans une atmosphère de plénitude. Le calme environnant, l’énergie vibratoire de l’eau et tout autour ce cadre inspirant de montagnes qui pousse le regard vers des perspectives illimitées.  À la vie comme en cuisine, le chef ne se fixe aucune limite, les repoussant sans contraintes. La dégustation est à l’image de ces perspectives ouvertes à l’infini, l’absolu des possibles comme seul guide et une cuisine qui vient puiser au plus profond des saveurs extraites, subtilement réconfortantes ou puissamment percutantes, c’est selon l’instant et l’énergie du moment.

Le Chef Jean Sulpice dans ses cuisines

© Franck Juery

Choisir le métier de cuisinier, c’est déjà un défi de tous les jours… « Opter pour la gastronomie, c’est un véritable chemin de vie pour lequel il faut tout donner, tout le temps ».

Bercé près des fourneaux d’une famille maternelle d’hôteliers-restaurateurs à Aix-les-Bains, inspiré par des parents entrepreneurs et un frère sportif de haut niveau fauché en pleine ascension, Jean Sulpice a le goût infusé comme une évidence du travail bien fait et des défis accomplis. Alors que son frère atteint le plus haut niveau mondial dans sa discipline et perd subitement l’usage de ses jambes, un monde s’écroule. Et lui débute dans le métier de cuisinier. 20 ans de maturité d’un coup et une voie qui se dessine sur les bords du lac du Bourget, l’envie de s’accomplir pleinement, de ne rien regretter sûrement, pointe et prend son envol à force d’envie.

Sentiers ascensionnels

Une envie qui le guide à tout moment, mêlée d’instinct et de travail, d’intuition et de conviction. Puis, sur une lettre de papier bleu, écrire son destin, le mettre entre les mains de l’un des plus grands et entrer dans les cuisines de Marc Veyrat. Puis tout reprendre à zéro, garder les codes en tête et s’en affranchir mais aussi gagner en précision et en engagement. À l’école de l’excellence, il faut sauter la barrière de l’académique et s’élever pour espérer s’élever au rang d’art. Reste encore à trouver sa propre cuisine, à composer sa musique à soi.

L’héritage de ses mentors en bandoulière, la cuisine devenue une quête de sens, Jean Sulpice qui a entre-temps rencontré l’amour auprès de Magali alors sommelière, a toutes les clés en main pour créer l’étincelle.

Table à l'Auberge du Père Bise

© Franck Juery

Il n’a que 23 ans lorsqu’il prend une place de chef à Val Thorens, le temps d’une saison qui s’étale et dure presque une adolescence, 14 ans battants. Là, à la table étoilée la plus haute d’Europe, culminant à 2 300 mètres d’altitude, l’eau ne bout pas à 100° et il faut s’adapter aux conditions de la haute montagne. À la vie aussi, rude et parfois extrême, exigeant souvent le dépassement. Qu’à cela ne tienne, Jean Sulpice est un montagnard pure souche et un sportif pleine balle et dans son restaurant L’Oxalys, les plantes de montagne, les fromages des alpages et les produits terriens s’expriment franchement et sans détours. « J’ai ouvert ma propre voie avec beaucoup d’humilité et une seule envie ancrée puissamment : créer des plats qui soient à la fois élégants et percutants, sans jamais rien s’interdire », nous dit-il avec une sensibilité qui ne sacrifie rien à l’ostentation.

En retrouvant les rives du lac d’Annecy, pas tout à fait celui de ses origines aixoises mais pas loin, à 450 mètres d’altitude, il poursuit son ascension et se libère des contraintes de la haute montagne pour repousser encore les curseurs. Ceux des sommets qu’il convoite à pied et à vélo et ceux qu’il vise dans l’émerveillement d’une assiette, la justesse d’un assaisonnement ou la force d’un goût puisé dans la racine.

Cuisine émotionnelle

Partir en exploration sur les voies de la haute cuisine alpine de Jean Sulpice, c’est comme cheminer sur un sentier de randonnée, plonger dans une forêt d’épicéa, laisser les alpages fleuris se déployer à perte de vue, cueillir un bouquet d’herbes et humer les senteurs boisées et, une fois la cime atteinte, exploser de bonheur en voyant le paysage des possibles s’ouvrir à l’infini. En une bouchée fumante, sentir la mousse humide et la saveur presque évanescente d’un champignon, à la cuillère léchée, savourer toute la force d’une fougère aux accents réglissés et par petites lampées se délecter d’un jus d’épicéa puissant accompagnant la tendresse d’un agneau de lait juste rosé.

Plat du Chef Jean Sulpice

© Franck Juery

Les souvenirs de la dégustation se ramassent à la pelle, une bille herbacée qui explosent en bouche, une saveur d’escargot qui retrouve son environnement naturel d’herbes, un brochet fondant relevé de raifort et de notes salines de poutargue, une cueillette printanière d’asperges, de radis, de petits pois et de morilles… Parcourir les vallées et grimper au sommet, soleil au zénith, redescendre par la forêt et humer l’atmosphère humidifiée, trouver l’alchimie à chaque pas et achever la balade par une note de fenouil anisé et de rhubarbe acidulée qui réveille sans rien emporter. Magie de l’instant.

Et, tout au long de l’escapade, retrouver les madeleines de Proust de nos enfances savoyardes, bercées par nos grands-mères qui gratinaient les blettes sur le coin du fourneau, qui garnissaient les gâteaux d’une gelée de cassis cueillis dans le jardin et qui tapissaient leur fond de tarte d’une rhubarbe cinglante à laquelle nous rajoutions de moins en moins de sucre en grandissant.  Laisser frémir en soi la vibration d’un moment inscrit dans les temps et retrouver les sensations oubliées.

Partage fusionnel

Une histoire qui se susurre à l’oreille et raconte aussi celle de tous ceux et toutes celles qui la constellent. Parce que derrière un grand plat il y a les hommes et les femmes qui apportent leur savoir-faire et leur amour de leur produit. Un environnement d’attaches humaines qui donnent le ton. La simplicité d’une relation en fusion, la naturalité d’un produit extraite jusqu’à la lie et à l’unisson, une cuisine qui exhale tous les sens.

Philippe Héritier, l’héliculteur, Florent Capretti, le pêcheur, Kévin Neveu, l’artisan-boulanger, Marc Dubouloz, le fromager, Marine Couchard, la cueilleuse de fleurs, Cécile Ballauri, la céramiste… et tant d’autres qui composent la galerie de portraits, des passionnés aux valeurs partagées.

Le Chef Jean Sulpice et sa brigade

© Franck Juery

Côté salle, elle est saupoudrée de sourires et vous ouvre les portes d’une caverne de trésors parmi lesquels le livre des vins vient trôner fièrement. À la faveur de ses 30 000 bouteilles et de ses 5 000 références, sous la baguette de la cheffe sommelière Maéva Rougeoreille, qui vient de se voir décerner le prix de la sommellerie par le Guide Michelin, c’est tout un univers qui se dévoile. « À travers le vin que j’ai d’abord découvert grâce à mon épouse Magali, ce sont des personnalités qui animent du vivant et tout un terroir qui s’expriment en cœur. Le monde du vin vit à l’unisson avec celui de la gastronomie et Maéva sait créer cette synergie qui érige l’expérience culinaire à un autre niveau », confie le cuisinier avec fierté.

Une expérience totale qui se savoure autant qu’elle se ressent, les perceptions au diapason.

Une autre histoire…

Alternative aux délices, le restaurant Le 1903 garde le cap d’une gastronomie raffinée à l’inspiration puisée dans la nature tout en offrant une échappée plus accessible pour goûter à la cuisine instinctive du chef à travers une version axée sur la transmission d’un patrimoine culinaire qui a tant à raconter.

Pour un petit-déjeuner féérique ou un goûter sur le pouce, immergés dans ce décor magique, le Marius Bar peut être encore une autre façon de vivre un moment privilégié à l’Auberge du Père Bise qui compte également un Spa de 480 m2 et un hôtel de 22 chambres et suites plongeant sur les eaux du lac. Le tout minutieusement orchestré par Magali pour que chaque espace soit une promesse d’immersion et de déconnexion totale, les sens en frémissement.

À la boutique aux trésors, sur l’étal de la chocolathèque craquante et à la carte des plaisirs simples, pour un instant seulement ou un pique-nique gourmand, repartir avec un panier alléchant, offrir un morceau de gourmandise croquée et profiter d’une parenthèse suspendue dans cette Maison qui surgit comme dans un rêve et sent bon l’âme de ceux qui l’occupent.

Terrasse de l'Auberge du Père Bise

© Franck Juery

Restaurant Auberge du Père Bise – Jean Sulpice

303 route du Port – TALLOIRES-MONTMIN

Tél. +33 (0)4 50 60 72 01

 

Restaurant Auberge du Père Bise – Jean Sulpice

Crédit photo haut de page :

  • © Franck Juery

Journaliste : Gaëlle Tagliabue