
Inspiration
Bois et osier : quand la création puise dans les racines du vivant
Elles travaillent au plus près de la nature, chacune avec sa matière de prédilection : l’une l’osier, l’autre le bois.
Deux créatrices, deux approches singulières, mais un même fil conducteur : valoriser des ressources naturelles locales et redonner du sens au geste artisanal.
À travers leurs mains, le bois et l’osier se transforment en objets du quotidien ou en pièces artistiques. Une plongée dans des univers où la matière première impose son rythme et inspire des créations ancrées dans le temps.
Yann-Marie : tisseuse de liens entre l’humain et le végétal
« J’aime entremêler l’art et la matière pour créer des ponts entre l’humain et le végétal. »
Installée à Gruffy depuis un an, Yann-Marie redonne vie à un métier ancestral : celui de vannière. Dans son atelier niché au cœur de la nature si verdoyante en ce début de printemps, elle entremêle l’art et la matière, créant des ponts sensibles entre l’humain et le végétal.
Paniers, aménagements d’intérieur ou d’extérieur de type gloriettes ou labyrinthes végétalisés, projets pédagogiques dans les écoles, stages, animations ou démonstrations, elle aime la variété de son travail autant que transmettre sa passion et son savoir-faire. Elle organise aussi des stages à Gruffy une fois par mois. Le succès est au rendez-vous car le planning se remplit à peine mis en ligne sur son site.

© Vannerie Yann-Marie
« Un brin d’osier passe une vingtaine de fois dans ma main avant de devenir un panier« , explique-t-elle. Des gestes précis, patients et répétitifs, qui façonnent, tressent et réinventent les savoir-faire ancestraux.
De février à début avril, Yann-Marie entre dans une période singulière : celle du travail avec l’osier vivant. Une saison courte mais intense, durant laquelle elle conçoit et réalise des cabanes, gloriettes, tunnels ou labyrinthes végétalisés. Chaque projet commence par une étude attentive du terrain, puis par le choix rigoureux du type d’osier le plus adapté – elle en utilise pas moins de 18 variétés différentes, qu’elle sélectionne en fonction de la forme, de la souplesse ou de la couleur souhaitées. Elle élabore ensuite des croquis précis selon le type de tressage envisagé, le but étant d’éviter le plus possible le recours à une structure porteuse, grâce à l’utilisation de techniques traditionnelles de vannerie.

© Vannerie Yann-Marie
Ces techniques ancestrales donnent vie à des architectures entièrement végétales, à la fois solides et poétiques. Une cabane peut être réalisée en une journée seulement, parfois seule, parfois avec les clients, dans un esprit de transmission et de partage. Une fois la structure en place, elle nécessite une taille annuelle, que Yann-Marie peut également assurer. Ce travail minutieux repose sur une préparation longue et méticuleuse : l’osier est coupé en décembre, conservé dans de l’eau pour les usages vivants ou bien trié, calibré et séché dans sa grange. Elle peut même leur donner une forme particulière.
« Autrefois, il y avait un vannier dans chaque village. Aujourd’hui, nous sommes à peine 200 en France ». Le métier, qui a failli disparaître avec l’arrivée des contenants en plastiques, est en pleine renaissance, notamment porté par l’intérêt croissant des lieux haut de gamme, comme les restaurants gastronomiques, par exemple, avec lesquelles les collaborations se multiplient. Yann-Marie vient ainsi de signer une arche pour le restaurant ANTO à Annecy, et s’apprête à réaliser un plafond acoustique à L’auberge du Pont de L’Abîme à Gruffy.
Un savoir-faire rare à découvrir et à partager, lors d’un stage ou d’une rencontre dans l’atelier de Yann-Marie à Gruffy.

© Vannerie Yann-Marie
Atelier Ruca : le bois, une matière inspirante
Notre voyage créatif se poursuit du côté d’Entrevernes, où Léa, tombée amoureuse de la région a choisi de poser ses valises il y a 7 ans. Elle en a profité pour changer de cap, laissant derrière elle sa carrière de photographe pour se consacrer à une autre passion : le travail du bois.
Créer de ses mains est une tradition familiale : elle a grandi en observant son père bricoler et travailler le bois. Une matière vivante et chaleureuse qui l’a toujours fascinée par sa texture, son odeur, ses veines uniques, et qu’elle prend plaisir à explorer au fil de ses créations. Objets en bois, art de la table, décoration d’intérieur… elle sculpte, taille, tourne, ponce, polit, assemble, explore les courbes chaleureuses du bois, selon son inspiration pour donner naissance à des pièces uniques.

© Anaïs Brebion – Atelier Ruca
« Je ne me prétends ni ébéniste, ni menuisière. Je suis autodidacte, sans diplôme, je crée simplement des objets en bois, selon l’inspiration du moment ».
Frêne, chêne, noyer, les essences qu’elle utilise proviennent de sources durables et respectueuses de l’environnement : elle privilégie le bois de récupération, comme de vieilles poutres, des meubles oubliés ou des planches chinées dans des vide-maison par exemple. La forme, la veinure ou même l’histoire de du bois lui inspirent ses créations : soliflores, vaisselle, planches à découper, bougeoirs, petits objets de décoration.

© Anaïs Brebion – Atelier Ruca
Quelques-unes de ses réalisations ont même trouvé place sur les tables de certains restaurants de renom : elle a par exemple réalisé des bols, rond de serviettes, branches apéritives et plateaux de services en collaboration avec le chef Clement Briand-Seurat, pour le restaurant Céna à Montpellier.
Une collaboration avec les chefs qui comporte quelques contraintes, comme le fait de respecter des normes sanitaires, mais qui est également un exercice de co-création particulièrement stimulant, souligne Léa : « Souvent la demande initiale évolue au fil des échanges avec le chef. Cela m’oblige à m’adapter pour dépasser les attentes initiales, et à aller au-delà de ce que j’aurais imaginé seule ».
Elle crée aussi des objets pour des demandes spécifiques, pour des particuliers ou des professionnels, toujours dans le respect de ses valeurs et de son esthétique. Mais rien de tel qu’un petit tour sur son site ou son compte Instagram pour se rendre compte de son sens de l’esthétique et de l’attention qu’elle porte aux petits détails.

© Anaïs Brebion – Atelier Ruca
Une autre histoire
Crédit photo haut de page :
- © Anaïs Brebion – Atelier Ruca
Journaliste : Aude Pollet Thiollier